JE CHERCHE UNE FEMME

Essai visuel et poétique

Je cherche une femme.

Celle qui se terre entre mes os glacés et sourd parfois de ma chair, par un geste étranger à ce quotidien ruisselant ;

celle qui se glisse, de temps à autre, entre mes mots ou mes soupirs, comme une invitation à se contorsionner et à déjouer le silence. Celle qui me met au défi d’abandonner ce corps en vie dans la torpeur d’un rêve tout blanc, sans plus aucune branche à laquelle s’agripper.

Je cherche une femme qui ne se représente pas et qui a le don de faire fléchir les miroirs,

je ne cherche ni peau ni écorce dans laquelle me fondre, pas plus que je ne cherche de troncs, d’arcs ou de remparts à mon impuissance, je n’attends pas de cette femme qu’elle puisse m’offrir la quiétude d’un chêne, la candeur d’une marguerite ou l’autorité d’un roc, je ne veux pas sceller davantage celle qui bat tout près, si bas, j’attends simplement d’elle qu’elle soit et qu’elle s’impose à moi telle quelle.

Dans tous les recoins de ma peau à sec, sur le sillon de mes voyages égrenés au gré de cette respiration irrégulière, dans les sombres abysses d’une mémoire reclue, je la cherche.

Je ne me souviens plus vraiment à quand remonte cette quête tant aujourd’hui elle s’est installée en moi et fait corps, donnant à penser que mon être tout entier ne peut exister en-dehors de celle-ci. Mon corps en est devenu son réceptacle, ne battant plus qu’au rythme de ses avancées et dans sa chair en inscrivant la portée. Semblable à la voile arquée d’un trois mats en plein vent, il sculpte dans la mer un étroit sillon sans fin, du blanc de ce rêve devenu obnubilant.